23 avril 2004 : fin du charbon français

23 AVRIL 2004 : LA DERNIÈRE BERLINE DE LA HOUVE (CREUTZWALD), C’EST LA FIN DE L’EXTRACTION DU CHARBON EN FRANCE…

La Houve est un ensemble de sièges constitué de huit fosses sur cinq carreaux à CREUTZWALD et dans les environs (Moselle), le nom choisi est celui d’une forêt avoisinante. Le 23 avril 2004, l’arrêt de ce grand ensemble marque la fin de l’extraction du charbon en Lorraine mais aussi en France. La production totale de la Houve a été de 106 millions de tonnes de charbon entre 1895 et 2004.

Vingt-deux veines ont été exploitées dans ce secteur pendant plus d’un siècle, on les appelait par des prénoms d’actionnaire ou de directeur (Max, Jules, Marie, Albert, Pierre, Georges, …). La première d’une ouverture de 0,95 m a été trouvée dès 1854 à -214 m dans le puits Max malheureusement noyé en 1864 et abandonné. Le charbon est, à l’époque, très recherché en Lorraine (Bassin dans le prolongement de celui de la Sarre déjà productif) car, depuis le début du XIXème siècle, c’est le combustible indispensable pour les grandes industries qui commencent à se développer dans la région : métallurgie autour de LONGWY, cristalleries de BACCARAT, faïenceries de SARREGUEMINES, salines de VARANGÉVILLE pour ne citer que les sites les plus connus, …

Ce n’est pourtant qu’en 1895, en territoire allemand, que le siège I de la Houve constitué des deux puits Marie et Jules est devenu opérationnel ; à proximité a été construite la première centrale thermique (la SALEC) dont la puissance électrique est passée de 800 kW au départ à 10 MW en quelques années juste avant le premier conflit mondial (la centrale cessera son activité en 1953). Les six autres puits creusés par la suite constitueront le siège I I.

fincharbon01.jpg

Le puits 4 (rénové en 1951) à gauche, le puits 3 à droite et les terrils avant 1983.

  • Siège

    Puits

    Lieu

    Période d’activité

    Fonctions

    Siège I

    Puits 1 Marie

    CREUTZWALD

    1895-1955

    extraction, service, aérage

    Puits 2 Jules

    CREUTZWALD

    1900-1955

    extraction, service, aérage

    Siège I I

    Puits 3 Ulrich

    CREUTZWALD

    1913-2004

    extraction, service, aérage

    Puits 4*

    CREUTZWALD

    1927-2004

    extraction, service, aérage

    Puits 5

    CREUTZWALD

    1923-1927

    station de pompage d’eau

    Puits Barrois

    CREUTZWALD

    1935-1988

    extraction, service, aérage

    Puits de Vernejoul*

    PORCELETTE

    1954-2004

    extraction, service, aérage

    Puits Ouest

    BISTEN

    1987-2004

    aérage

* puits équipés d’un skip.

Le même ensemble après 1983 (date de la rénovation du puits 3)

L’utilisation des soutènements marchants dans les années 70 permet d’obtenir des rendements très importants (9710 t/jour en veine Albert mais le record appartient au siège Reumaux de FREYMING -MERLEBACH en veine Irma avec 14300 t/j en 1987). A partir de 1985, toute la production remonte par le puits de Vernejoul. Dans les années 90, l’haveuse Electra qui est la plus puissante au monde (1,2 MW) permet de maintenir de bons résultats mais la fin du charbon est inexorable. Les dernières gaillettes remontent du puits de Vernejoul à - 570 m le vendredi 24 avril 2004, l’ultime berline est suivie par la dernière équipe de jour portant à bout de bras la statue de Ste Barbe qui nichait dans son alcôve au fond de la fosse. Le puits de Vernejoul est détruit en avril 2005 et les puits 3 et 4 respectivement en mars et décembre 2007.

Le puits et le lavoir ultramoderne de Vernejoul à PORCELETTE.

La Houve, matériels et transports

La Houve ! Rien que ce nom me fait frissonner tant il rappelle un site minier égaré en pleine forêt, elle-même perdue aux confins de la Lorraine et à la limite de la Sarre, où l’on ne sait plus si c’est encore la France ou bien déjà l’Allemagne…

La Houve ! Gisement houiller où les mineurs pouvaient se tenir debout, mais aussi où les galeries étaient devenues des cathédrales où des monstres de technologie allaient finalement remplacer les hommes et leur gagne-pain.

La Houve ! Ultime bastion d’un temps révolu où les derniers arracheurs de charbon se sont battus, tels les grognards de Napoléon, afin de rester dans la légende et inscrire, pour les générations récentes et à venir, les pages devant pérenniser l’histoire de cette source d’énergie qui avait permis la formidable évolution industrielle du 19ème siècle.

Haveuse Electra 2000 pour abattage horizontal. Chacun des deux tambours était plus haut qu’un homme.
Soutènements marchants derrière ligne d’abattage   Haveuse ANF D11 pour travail vertical sur le dressant

(Photos Pierre Ombrouck)

Quelques locotracteurs BERRY (ancien constructeur lillois) qui circulaient à Creutzwald-La Houve

Tandem électrique NC104-2TR de 200 ch en voie métrique et au fonctionnement entièrement électronique
A gauche, transport de personnel au fond de La Houve A droite, exposé au parc du musée Wendel à Petite-Rosselle

(Photo HBL) (Photo Musée)

Exposé place du Château à Merten, locotracteur diesel D 2784 F4 de 90 ch à double cabine et voie métrique de 1950.

Unique survivant d’une série de 10 machines construites pour le grand roulage de la Houve (photo Pierre Ombrouck)

Deux locotracteurs 2755 T4 de 50 ch en voie métrique, utilisés sur le grand roulage de La Houve à compter de 1950.

A gauche, sur le site de l’ancien puits Max à Carling - A droite, rue de l’Eglise à Falck (ph. Pierre Ombrouck)

La Houve n’est plus, mais le Musée Wendel de Petite-Rosselle représente de manière exceptionnelle les techniques qui ont permis à ce siège de battre les records de production et de tenir jusqu’au 21ème siècle.

Georges TYRAKOWSKI, Pierre OMBROUCK pour l'APPHIM


Date de création : 27/04/2014 15:35
Catégorie : Les dates-les personnes - Post-Nationalisation
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Réactions à cet article

Réaction n°1 

par Mauricecharlesdupont le 23/08/2021 11:13

Lorsqu'un jour sur Facebook, moi Maurice Charles Dupont, mineur de fond en 1946 dés mes 14 ans jusqu'à 50 ans, soit 36 années de carrière au fond aux HBNPC. J 'ai << osé >> dire que le travail du mineur de fond de l'après seconde guerre n'a absolument, mais absolument rien de comparable avec celui fait par les mineurs n'ayant commencé leur activité au fond qu'après 1960, c'est à dire la période ou l'abattage du charbon et le creusement sont désormais mécanisés, ce que Monsieur Alexis DESTRUYS  Secrétaire Général du Bassin appelle la mine moderne. Un mineur ''BIDON'', personnage imbus de sa personne qui de surcroît n'a jamais mis un pied au fond m'a accusé de qualifier mes collègues mineurs de fond débutant leur carrière au-delà de 1960 de: SOUS-HOMMES ? Or, ceux des mineurs d'après 1960, entre autres mes collègues Lorrains, il y a bien longtemps disaient déjà que les mineurs du Nord de la France travaillaient comme des prostituées, parce que couchés. (propos rapportés dans son  livre par Monsieur Augustin VISEUX. En effet l'épaisseur moyenne de nos couches de charbon était de 0,70 mètre et  manuellement exploitées, avec le marteau-piqueur, la pelle, le pic , la scie à main et la hache et le soutènement réalisé avec des branches d'arbres, idem pour le creusement des galeries. Et au-delà, même de 1952 ce qu'indique dans son excellent livre Monsieur Viseux, il n'y avait déjà plus aucune taille traditionnelle, exploitée manuellement, ce que moi je porte à 1960 la période où le soutènement marchant est quasi généralisé et, tous les tailles et creusements mécanisés. Par ce reportage  remarquablement rédigé et illustré il est clair qu'il faut se méfier de ces affabulateurs , nuisibles pour ce qui est le bien fondé de l'histoire de la mine et des mineurs. Parce qu'en effet nous mineurs qui travaillions couchés apprendre que nos collègues Lorrains avaient des galeries comparables à des cathédrales, une haveuse la plus puissante du monde avec un rendement fond et jour/par ouvrier de 3 tonnes, rendement le plus important d'Europe et de bons salaires,  j' avais raison . Pour autant j'approuve le raisonnement de ce journaliste lors de la fin de l'exploitation du charbon en Lorraine donc en France.

Il faut savoir que bon, la mine a tué beaucoup de personnes et puis moi je pense profondément à tous ceux qui ont disparu et puis aussi aux familles qui ont été cruellement meurtries dans tout ça. Il y a aussi des grands grands blessés, des handicapés. Et je pense qu'il faut beaucoup penser à eux dans ces moments-là. Parce que c'est bien beau de fêter des cérémonies mais c'est aussi une période de recueillement, je pense.

Journaliste       ( il a pleinement raison) MCD